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    Intervention du sénateur Jean-Pierre Chevènement lors du débat sur le projet de loi sur l'orientation et la programmation de la sécurité intérieure, 7 septembre 2010.

    voir son blog : http://www.chevenement.fr


    Vers une privatisation de la sécurité publique Monsieur le Ministre,

    Sur ces questions difficiles d'insécurité qui préoccupent à juste titre nos concitoyens, je suis soucieux de garder un ton mesuré.

    Vous nous présentez un projet de loi d'orientation et de programmation dont les dispositions sont quelque peu fourre-tout.

    Certes, l'article 1 du projet a pour but d'approuver un rapport annexé sur les objectifs et les moyens de la police, de la gendarmerie et de la sécurité civile, à l'horizon 2013, et la plupart des objectifs affichés ne sont guère contestables. Qui pourrait en effet s'opposer à l'utilisation de technologies nouvelles au service de la sécurité de nos concitoyens ?

    Je pense qu'il faut relativiser la controverse sur la vidéoprotection : celle-ci, de par mon expérience, a montré une certaine efficacité pour pacifier, par exemple, des halls d'immeubles devenus infréquentables, mais je ne sais pas à quoi correspond l'objectif de tripler d'ici 2013 le nombre des caméras de 20 000 à 60 000. Le manque d'indépendance des organes de contrôle de la vidéosurveillance n'est pas satisfaisant, comme l'a fait observer ma collègue, Madame Anne-Marie Escoffier.
    1. Il faut laisser aux collectivités locales leur marge d'initiative puisque l'exploitation et le coût de la vidéosurveillance leur incomberont.

    2. Je ne vous chercherai pas querelle sur les fichiers de police dès lors que leur utilisation reste contrôlée, sous l'égide de la CNIL. La police a besoin de fichiers pour réduire la délinquance. C'est une question de bon sens.

    S'agissant des moyens, j'observe que l'augmentation des crédits de 2009 à 2013 est assez faible : 2,7 % au total, et que la loi qui s'applique depuis 2009 inclut dans son financement, s'agissant de la modernisation des équipements, les ressources du plan de relance, déjà réalisé.

    Plus préoccupant, la RGPP qui a déjà supprimé 9 000 emplois de policiers et de gendarmes depuis trois ans, va continuer d'exercer ses effets : 1 329 postes de policiers et 1 303 postes dans la gendarmerie vont disparaître d'ici 2013. Votre réponse, dites-vous, est le recentrage de la police sur son cœur de métier.

    Votre véritable intention est de développer les sociétés de sécurité privées et les polices municipales dont vous suggérez qu'elles sont la véritable police de proximité, celle dont faute d'effectifs suffisants, vous n'avez plus les moyens ! Vous détruisez l'équilibre réalisé par la loi d'avril 1999 entre la police nationale et les polices municipales en accroissant les prérogatives de celles-ci, sans paraître vous aviser que vous creusez par ailleurs l'écart entre les communes riches et les communes pauvres. M. Sarkozy a supprimé, bien à tort, la police de proximité, en 2003. C'était une réponse de bon sens que d'affecter une police territorialisée à des bassins de délinquance bien identifiés. Sans doute la formule lancée en 2000 était-elle perfectible mais vous ne lui avez pas laissé le temps de faire ses preuves. D'ailleurs vous y revenez subrepticement dans votre projet de loi en évoquant la création d'une police de quartier.

    Mais les moyens vous manquent. M. Sarkozy avait créé des postes en 2002-2003 qu'aujourd'hui vous faites plus que supprimer. Est-il raisonnable de vouloir résoudre vos difficultés par un simple transfert de charges aux collectivités que, par ailleurs, vous voulez mettre à la diète ? Il y a des glissements dangereux dans ce cantonnement de la police nationale à ses tâches régaliennes stricto sensu, et en fait dans son retrait progressif de son rôle de proximité au service de la sécurité au quotidien de nos concitoyens.

    Les sociétés de sécurité privées n'offrent pas les mêmes garanties de déontologie que la police nationale. Je pourrais prendre l'exemple révélé par la justice de certaines sociétés d'investigation françaises et même étrangères qui ont opéré pour le compte d'entreprises du secteur de l'armement, comme Thomson et Matra. Que de débordements, que d'excès, que d'intrusions illicites, opérés au mépris de l'intérêt national par d'anciens agents de renseignement français et étrangers, et cela dans l'intérêt du client, premier coupable, et au mépris bien souvent de l'intérêt national !

    Il est certes utile d'encadrer les activités privées d'intelligence économique mais l'interdiction pour d'anciens agents de renseignement d'exercer pendant les trois ans suivant la date à laquelle ils ont cessé leurs fonctions, interdiction assortie de dérogations, est franchement insuffisante. Elle favorisera les interpénétrations et nuira à la rigueur du service public.

    Ce que vous réalisez en catimini, c'est une privatisation de la sécurité publique. On voit bientôt le moment où les agents de la sécurité privée - aujourd'hui 170 000 - dépasseront les effectifs de la police nationale et de la gendarmerie - aujourd'hui 220 000. Vous venez de créer un poste de délégué interministériel à la sécurité privée, comme si vous pouviez sans risque grave pour les libertés déléguer au privé des fonctions de surveillance qui mettent en cause les libertés publiques. La RGPP débouche sur la privatisation de la sécurité publique.

    J'ajoute qu'il est dangereux de vouloir mêler la sécurité intérieure et la sécurité extérieure : c'est ouvrir la voie à bien des confusions et à des amalgames sommaires. Il vaut mieux que les agents de renseignement n'interfèrent pas trop avec la sécurité publique, au risque de dérives qui mettent en jeu les libertés.


    Votre bilan en matière de sécurité est loin d'être aussi flatteur que vous le laissez paraître dans le rapport annexé. La politique du chiffre impose des charges de travail excessives aux services de sécurité. Elle n'enregistre pas correctement la délinquance de proximité : la « main courante » se substitue aux dépôts de plainte. Elle ne peut dissimuler l'augmentation de violences faites aux personnes et notamment contre les forces de sécurité, auxquelles je veux rendre l'hommage qu'elles méritent, compte tenu des risques croissants qu'elles encourent du fait de la violence accrue des bandes. Vous reconnaissez vous-même votre échec en prévoyant dans le rapport annexe la multiplication des équipements de protection des forces. La réponse que vous prétendez apporter avec la déchéance de nationalité des auteurs de violence contre les policiers et les gendarmes sera, vous le savez bien inefficace, à supposer même qu'elle soit compatible avec la Constitution, ce dont je doute.

    Mai là n'est pas le problème à vos yeux. Votre politique est essentiellement gesticulatoire. M. Sarkozy, il y a cinq ans, prétendait nettoyer les quartiers au karcher. Il entendait les purger de la « racaille » qui n'est pas tout à fait la même chose que les sauvageons, soit dit en passant.

    Ministre de l'Intérieur hier, Président de la République aujourd'hui, M. Sarkozy fait du thème de la lutte contre l'insécurité une utilisation essentiellement politicienne. Tous les ans et même plusieurs fois par an, il enfourche son destrier, fait lever les oriflammes, sonner les trompettes : il déclare une guerre sans merci à la délinquance. Force est de constater, puisqu'il déclare la guerre plusieurs fois par an, depuis plusieurs années, qu'il ne la gagne pas. Au contraire ! Votre politique, Monsieur le Ministre, nourrit la violence plutôt qu'elle ne la calme, car l'excitation est communicative.

    Vous avez, selon mes chiffres, plus que doublé le nombre des gardes à vue depuis l'an 2000 - alors que vous n'avancez qu'un modeste + 51 % dans votre rapport. Ne pensez-vous pas qu'une politique plus ciblée vous éviterait bien des critiques comme celles que mon collègue, M. Jacques Mezard, a formulées à juste titre, du point de vue des libertés ? Vous brandissez l'arme de la déchéance de la nationalité française, comme si M. Sarkozy ne s'était pas targué d'abolir, en 2002, ce qu'on appelait improprement d'ailleurs, la double peine, c'est-à-dire la peine complémentaire consistant à reconduire à la frontière les délinquants ayant commis des actes particulièrement graves. La gauche avait maintenu cette peine complémentaire de 1997 à 2002. Vous, vous voulez aller beaucoup plus loin : vous voulez retirer la nationalité française à ceux pour lesquels, par ailleurs, vous organisez des cérémonies, en préfecture, pour les accueillir dans la communauté nationale. Où est la logique ? On ne peut pas à la fois faire et défaire, valoriser et dévaloriser. Votre logique n'est pas une logique de sécurité : en réalité, votre seule logique est électoraliste. Vous exploitez un filon. Napoléon choisissait son terrain, le plateau de Pratzen à Austerlitz par exemple pour écraser Russes et Autrichiens dans les marécages. Nicolas Sarkozy veut en faire autant avec la gauche en l'attirant, en 2012, sur un terrain fangeux où les esprits faibles se laissent facilement égarer : les problèmes de l'insécurité sont difficiles. Ceux de l'immigration le sont tout autant. Un ministre de l'Intérieur républicain ne doit pas les mélanger. La fermeté est nécessaire mais vous devez ne pas distinguer entre les Français selon leur origine et ne pas transformer les juges en robots en étendant constamment et sans efficacité, le champ des peines planchers. De même, vous devez reconnaître aux étrangers les droits qui sont les leurs, sans faire d'une communauté entière le bouc émissaire de faits délictueux que nous voulons réprimer autant que vous mais de manière plus ciblée. En mélangeant tout, vous cherchez à exploiter à la fois la peur et la bêtise.

    J'ai quelquefois l'impression qu'en spéculant sur l'angélisme d'une partie de la gauche, vous êtes en train de réussir ! Je ne vous en féliciterais pas pour autant !

    Mais j'observe que le doute s'insinue dans les rangs de votre majorité : M. Juppé, dans le Figaro du 6 septembre, s'interroge : « Est-ce qu'il faut surmédiatiser le problème de l'insécurité et donner le sentiment qu'on s'en sert pour repiper des voix sur l'extrême-droite ? Je n'en suis pas sûr ! ». Ecoutez plutôt le conseil qu'il vous donne : « Chaque matin, on nous annonce une nouvelle loi sécuritaire. Appliquons donc celles qui existent ». On ne saurait mieux dire.

    M. Yvon Collin déposera tout à l'heure une motion de renvoi en commission pour vous donner le temps, de réfléchir et de revenir à une véritable politique de sécurité. M. le Ministre, il y a des lois qui ne sont pas nécessaires. Apprenez à gouverner par circulaires.


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  •  Chevènement : "j'envisage d'être candidat en 2012"

    Dépêche AFP, vendredi 2 juillet 2010, 05h00.


    Chevènement: L'ancien ministre de la Défense et Président du Mouvement Républicain et Citoyens (MRC) Jean-Pierre Chevènement a affirmé qu'il envisageait d'être candidat aux élections présidentielles de 2012, dans un entretien publié par France-Soir.
    "Si j'envisage d'être candidat, c'est parce que les circonstances sont gravissimes et qu'il faut faire 'bouger les lignes'. La France va mal", a estimé le sénateur du territoire de Belfort.
    "C'est bien beau de dire qu'on va retarder l'âge de départ à la retraite mais s'il n'y a plus de travail, si les entreprises veulent se débarrasser de leurs sexagénaires, comment faire?", a ajouté M. Chevènement.
    "C'est injuste pour les ouvriers. La retraite à 60 ans c'était une grande conquête pour la classe ouvrière", a-t-il poursuivi.
    Evoquant des rumeurs sur une éventuelle candidature à la présidence du Sénat en 2011, il répond: "je me suis uniquement déclaré disponible pour l'élection présidentielle de 2012".


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  •  Entretien au Nouvel Observateur : Le tocsin Chevènement                                              

    Le Nouvel Observateur : Quel regard portez-vous sur la crise qui frappe aujourd'hui l'euro ?
    Jean-Pierre Chevènement : Depuis 1992, le Mouvement des Citoyens et moi-même avons mis en garde les Français contre l'impasse historique du projet de Maastricht oublieux de la réalité des nations, il était évident qu'un projet de monnaie unique sans même un gouvernement économique pour équilibrer l'omnipotence de la banque centrale ne pouvait nous conduire qu'au gouffre. Nous y sommes aujourd'hui, malheureusement. Les institutions européennes, et notamment la Banque centrale, ne se sont focalisées que sur l'inflation et les déficits budgétaires des Etats, alors qu'il aurait fallu veiller aussi à l'endettement des ménages et des entreprises, à l'évolution de l'investissement, de la compétitivité et par conséquent à l'emploi. Ainsi aurait-on pu éviter des divergences insoutenables. Le pacte de stabilité arbitraire et rudimentaire imposé par le Chancelier Kohl en 1997 est complètement dépassé.

    Que faudrait-il faire pour enrayer la crise ?
    La première urgence voudrait qu'on règlemente les marchés, qu'on établisse un certain contrôle des mouvements de capitaux et qu'on interdise par exemple les ventes à découvert, comme le propose l'Allemagne. Aujourd'hui, nous sommes profondément désarmés devant la puissance des marchés. Les Etats sont des coquilles de noix face aux oscillations brutales de la spéculation. Et collectivement les Etats démontrent leur impuissance (zone euro, Union européenne, G20, etc.). La vraie priorité commande donc de défendre la zone euro pour éviter que la crise ne se répande d'un pays à l'autre, par un effet domino. Mais attention : cela suppose qu'on change les règles du jeu qui nous ont envoyé dans le mur. Comme l'a récemment souligné le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, on ne rétablira pas l'euro par un concours de plans de rigueur, avec blocage des salaires et diminution des retraites à la clé. L'Allemagne doit être conduite à jouer son rôle de locomotive de la croissance européenne par une relance de sa demande intérieure.
    Votre parti, le Mouvement républicain et citoyen, prévoit d'adopter le mois prochain un « programme de salut public ». Il faut faire la révolution ?
    La France née de Maastricht a un futur, mais elle n'a pas d'avenir. Elle est en pleine dépression. Nos concitoyens sont confrontés au chômage de masse, ils se voient condamnés à l'austérité à perpétuité. La République est à remettre debout, avec ce que cela suppose d'audace, d'exigence et de morale. La France a besoin d'un projet national pour se reconstruire. Elle en a eu à certains moments de son histoire, au début de la IIIème République, ou avec De Gaulle à la Libération, ou en 1958. La France des années 1930, en revanche, n'en avait pas. Et on a vu où cela l'avait conduit : Munich, la capitulation, Vichy... Nous n'en sommes pas loin.

    La droite ou la gauche ont-elles pris conscience, selon vous, de la gravité de la situation ?
    Nicolas Sarkozy fait preuve d'un certain pragmatisme sur le gouvernement de la zone euro, même s'il a tendance à emboiter le pas à Madame Merkel en engageant un concours de plans de rigueur. Quant aux socialistes... Je n'ai vu chez eux, à ce jour, aucune analyse de la mondialisation, ni aucune analyse critique de la monnaie unique. Aucune proposition pour relancer la croissance dans la zone euro et pour en changer les règles. Le tournant libéral en 1983, puis l'adoption du Traité de Maastricht ont brouillé leurs repères. Seul le volet fiscal de leur programme tient la route mais il ne peut suffire à rendre l'espoir à notre peuple. Pour mettre la gauche à la hauteur nous sommes toujours disponibles...

    Vous venez pourtant de claquer la porte des discussions que le PS avait ouvert avec vous sur l'organisation de primaires ?
    Martine Aubry s'est assise sur l'accord qu'elle avait signé avec notre parti pour les élections régionales. Quant aux primaires, elles sont aujourd'hui complètement ringardisées par la compétition médiatique arbitrée par les sondages, qui se déroule entre Dominique Strauss-Kahn, Martine Aubry et Ségolène Royal qui revient dans le jeu. Pour que ces primaires aient une chance de se dérouler dans de bonnes conditions, il aurait fallu qu'on ait d'abord un accord politique. Or, le Parti socialiste ne se préoccupe que de ses problèmes internes. Il n'offre pas un projet mobilisateur à la France.

    Qui défendra vos idées à la prochaine présidentielle alors ?
    Est-ce qu'un candidat de salut public peut surgir d'un des grands partis constitués, la droite et la gauche ayant voté ensemble le traité de Lisbonne en 2008? Il n'y a pas de grande capacité d'homme d'Etat à l'horizon : Sarkozy, Juppé, Strauss-Kahn, Aubry ont défendu ensemble l'Europe de Maastricht et approuvé le traité de Lisbonne. La logique, c'est donc qu'il y ait un candidat républicain en 2012. Mais ces choses là ne sont pas automatiques : il faut qu'un espace politique s'ouvre, que la conscience de nos concitoyens progresse sur la nécessité d'opérer des choix cohérents et courageux, bref qu'une demande de vrai changement pointe dans le pays.

    Une « demande » qui s'appelle Jean-Pierre Chevènement ?
    L'âge et l'expérience peuvent être un avantage : ils donnent une vue large des choses. Il faut aussi forcer la porte des médias qui supportent mal la pensée hétérodoxe. « En France, disait Chamfort, on laisse en repos ceux qui mettent le feu et on persécute ceux qui sonnent le tocsin ».

    Propos recueillis par Matthieu Croissandeau


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  • Les travaux de la Fondation Res Publica sur la zone euro

    Voici les principaux travaux que la Fondation Res Publica a conduits sur la zone euro et les questions monétaires.


    Les travaux de la Fondation Res Publica sur la zone euro


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    De beaux combats en perspectiveDe beaux combats en perspective


    La crise du capitalisme financier a franchi en Europe une nouvelle étape. Après que les Etats ont renfloué les banques privées défaillantes, il est apparu bien vite qu'ils ne pourraient pas recommencer une deuxième fois. Le gonflement de la dette publique est devenu tel que la solvabilité des Etats est mise en question par les marchés financiers. Ceux-ci ont commencé une danse du scalp frénétique autour des émissions de dette publique par les Etats considérés comme étant les plus endettés. Ces derniers ne peuvent déjà plus emprunter qu'à des taux doubles (6 % au lieu de 3 %) de ceux des bons allemands à dix ans (l'Allemagne étant toujours considérée comme la référence, car, avec sa politique de déflation salariale et budgétaire, elle a réussi à dégager un fort excédent commercial (138 Milliards d'euros encore en 2009) et même de contenir son déficit budgétaire (cinq points du PIB au lieu de 8 % pour la France, 12 % pour la Grèce ... et les Etats-Unis).

    Evidemment ce jeu est absurde : les marchés financiers spéculent comme c'est leur nature, mais leur spéculation vise à encourager la tribu des « doctrinaires vertueux » qui appellent de partout à lutter contre les déficits, à stopper le gonflement de la dette, etc. pour, enfin, « rentrer dans les clous de Maastricht ».
    M. Woerth, en France, a réclamé 50 Milliards d'économies budgétaires d'ici 2013. Les plans de rigueur s'annoncent partout et pas seulement à Athènes, Lisbonne ou Madrid.
    C'est une deuxième étape de la crise qui est devant nous. La danse du scalp des marchés financiers n'est pas sans évoquer le bal des sorcières : dans un monde revenu au Moyen-âge, les Etats sont considérés par les marchés financiers comme des faillis en puissance. Les marchés n'oublient qu'une chose : derrière les Etats, il y a les peuples. Ils veulent rayer trois siècles de luttes ! Ils veulent revenir sur la démocratie !

    Des gouvernements « socialistes », comme celui de George Papandreou en Grèce, ou Luis Zapatero en Espagne, peuvent bien se prêter aux exercices de rigueur qu'on leur demande, ils vont bientôt se trouver coincés entre la pression des marchés et la pression des peuples.

    Il va falloir maintenant proposer des choses sérieuses : remettre en cause les choix de politique monétaire et budgétaire que l'Allemagne impose au reste de l'Europe. C'est cela que j'appelle « un gouvernement économique de la zone euro », c'est-à-dire d'abord une politique de change qui passe par une réforme des statuts de la BCE (emploi, croissance et pas seulement lutte contre l'inflation). Il faut faire tomber le cours de l'euro. La Grèce nous y aide. Pas assez !

    Ensuite il faut sortir la zone euro de sa langueur économique. Chacun le sait : elle est la lanterne rouge de la croissance mondiale. Un « grand emprunt » européen permettrait de lancer un programme de relance sur le modèle chinois.

    A la crise actuelle il n'y a évidemment de solution que mondiale : La Chine seule n'arrivera pas à prendre le relais du consommateur américain défaillant. Quant à l'objectif avancé par Barack Obama - doubler le montant des exportations américaines -, il est simplement irréaliste. Pour sortir de cette crise immense qui est devant nous, il faudra remettre en cause les sacro-saintes règles du capitalisme financier globalisé :
    - le libre-échangisme déséquilibré d'abord ;
    - l'anarchie monétaire qui fait de l'euro le paillasson du dollar et du yuan (sans parler de la livre britannique qui a « dévissé » de 40 %. Si ce n'est pas du protectionnisme monétaire, qu'est-ce que c'est ?)
    Il faudra surtout remettre au pas le système financier et les oligarchies financières, re-réglementer les banques, reprendre le contrôle politique des banques centrales.

    En Europe il ne s'agit pas de « revenir à Maastricht » comme le serinent des dirigeants myopes, il s'agit :
    - soit de revoir de fond en comble toutes les règles de gouvernance de l'euro et de la politique économique au sein de la zone euro en s'appuyant sur la volonté des Etats de remettre les oligarchies financières à leur place : subordonnée;
    - soit, si cela s'avère impossible, de prendre en France des mesures de salut public, en s'affranchissant de règles dont chacun peut constater qu'elles sont devenues caduques, bref de rétablir la République ! C'est l'enjeu de 2012 en France.

    Il y a de beaux combats en perspective.

     


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